Éléments pour appréhender un genre historique scolaire
Sylvain Doussot, doctorant (Université de Nantes). Mots clés : outils graphiques – didactique – histoire – concepts
Résumé :
Cette communication est tirée d’une recherche en cours dont la problématique s’inscrit dans le troisième axe du colloque (questions portant sur les élèves et les apprentissages).
Le questionnement initial porte sur le lien entre l’utilisation des outils graphiques (listes, tableaux, schémas, etc. au sens de J. Goody) et la construction problématique et argumentée du texte d’histoire au collège. Ce qui suppose d’abord de considérer problématisation et argumentation historiques comme un processus, c’est-à-dire une écriture en train de se faire. La question devient alors : comment les outils graphiques favorisent-ils le re-travail sur un texte, par des aller retours de l’individuel au collectif, de l’écrit à l’oral ?
Ce questionnement est né de la rencontre d’une pratique enseignante orientée vers l’aide méthodologique en histoire et d’une lecture, La raison graphique de l’anthropologue J. Goody. Ce rapprochement entre pratique et théorie induit une analyse didactique. De ce point de vue, l’anthropologie culturelle et historique de J. Goody entre directement en résonance avec la psychologie socio-culturelle de Vygotski et guide la recherche vers l’analyse des activités langagières au sein de la classe. Dans ce domaine, c’est M. Bakhtine qui offre les outils les plus appropriés à travers ses concepts de polyphonie et d’intertextualité (ou dialogisme) : on peut y discerner, semble-t-il, le feuilletage des textes de l’histoire comme les caractérise M. de Certeau. Sur ces bases théoriques, il s’agit d’observer comment l’argumentation historique demandée aux élèves (questions sur des documents, paragraphe argumenté) se construit à partir de voix multiples et plus ou moins identifiées que l’élève doit orchestrer pour prendre sa place d’auteur.
L’hypothèse développée pour cette communication considère les outils graphiques comme favorisant la maîtrise des analogies (passé-passé et passé-présent) qu’évoque Nicole Lautier. A partir d’un choix de productions écrites d’élèves de 3ème (tableaux à double entrée permettant de classer des pays par catégories) et d’une transcription de leur discussion collective sur ces tableaux, il s’agit de montrer par l’analyse des activités langagières comment le support du tableau guide la construction de notions comme décolonisation, bloc de l’Est, bloc de l’Ouest. Cette construction semble s’organiser alors de manière polyphonique (au sens de M. Bakhtine) et par construction-altération (selon l’expression de M. de Certeau).